TERRY O’NEILL À LA GALERIE DE L’INSTANT. 16 JANVIER – 15 MAI 2013
Terry O’Neil est l’un des plus fameux portraitistes de beautiful people qui soit, depuis près d’un demi-siècle, et en même temps l’un des plus originaux, des plus rétifs aux poses convenues. Il est donc tout à fait étrange que son œuvre n’ait encore jamais été montrée pour elle-même à Paris. La Galerie de l’Instant pallie cette fâcheuse lacune en présentant jusqu’au 10 avril quelques uns de ses plus beaux clichés. Les rock stars ont la part belle, à commencer par les Stones : portrait de groupe sur fond de couleurs vives pour jeunes gens dans le vent, clin d’œil plein d’humour à Mick Jagger chez le coiffeur, et Mick encore, beau et grave, à qui la capuche de son manteau fait une auréole, en une saisissante icône de la modernité photographique. Bowie fut aussi un bon client pour O’Neil. La plus surprenante des images exposées est sans doute celle où le dandy anglais, aussi excentrique dans son accoutrement que placide dans sa pose, voisine avec un gigantesque dogue aux allures de chien des Baskerville, dressé sur ses pattes de derrière ; le contraste entre les figures donne à cette photo une énergie magnifique et presque inquiétante. Autre scène inépuisable : Bowie et Liz Taylor enlacés. Simple jeu sur le mythe des amants d’Hollywood ? Chez O’Neil, tout est toujours plus complexe. Coiffée d’un feutre, le geste volontaire, presque masculin, l’actrice brouille les genres face à un darling alangui, à la chevelure vaporeuse. De telles incertitudes font le bonheur du portraitiste, qui sait autant jouer avec les clichés (Audrey Hepburn tout en blanc, l’innocence même, une colombe sur l’épaule !) que les faire exploser (Brigitte Bardot très Bonnie and Clyde, cheveux au vent et cigare à la bouche, plus domina que femme fatale). Reste que, comme tous les grands du XXe siècle, il est avant tout un poète amoureux : de la fragilité de Romy Schneider, de la beauté de Marianne Faithfull – et par-dessus tout de Marlène, impériale devant le rideau fermé d’un théâtre, à Londres, en 1975. La jeune Kate Moss, vingt ans plus tard, a beau faire, le temps des dieux et des déesses est passé. Terry O’Neil aura eu le privilège ahurissant d’être admis sur l’Olympe.
François Croissy
Galerie de l’Instant, 46 rue de Poitou, 75003 Paris – jusqu’au 10 avril.